Luxembourg Tourisme n°156 du 15 décembre 2004
Nos Artistes
«L'art abstrait sans fard à joues» ou l'interrogation de Monique Layon
par Pierre-Alain Gillet
Crédit photos : Pierre-Alain
Gillet
Sans se soucier des modes, de l'air du temps, de l'avant-garde, des mouvements cinétiques, "mégalistes" ou minimalistes, Monique Layon peint. Et peindre lui permet de traverser le temps, les joies et les peines. Elle mord les couleurs à pleines dents.
Quand le grand canyon fait basculer les paysages vers l'abstrait
Filly
Ce superbe petit hameau à l'habitat regroupé constitue une "tête de vallon dans un cadre verdoyant". Ainsi définissait-on le village de Filly en 1969.
La
description est toujours d'actualité puisque l'on retrouve de beaux bâtiments souvent correctement rénovés.
L'introduction de l'Inventaire des Sites d'Arthur Haulot datant également
cette même époque est elle aussi toujours empreinte d'actualité
vivace et de
poésie :
"Nous sommes de ceux cependant qui ne croient pas nécessaire, pour aimer
le jazz
de vomir Mozart,
pour admirer Picasso de nier Rubens, pour acquérir la
beauté du ciel, d'effacer
celle de la terre...
La
poésie et la beauté sont nécessaires au monde d'aujourd'hui comme au monde d'hier.
Ceux qui le nient et
qui oeuvrent à le détruire, sont en vérité nos pires - et nos seuls
-
ennemis."
Entre plans de secteur et zonages du cœur.
La belle vérité
La maison galerie de Monique Layon est imbibée d'un silence de qualité, tout comme sa peinture. La gentillesse et la vérité cohabitent. Ce ne sont d'ailleurs pas des qualités antinomiques.
Monique Layon d'emblée, à la première poignée de main, vous fait comprendre que la peinture pour elle est une nécessité de vie et qu'elle cherche par le travail, se laisse prendre au piège de son art qui la commande.
Avec un naturel
désarmant, sans une once de pose dans la voix, elle vous dit: "pourquoi fais-je
des choses qui me dépassent, très abstraites..."
D'ailleurs, quand elle est
entrée dans l'abstraction tout naturellement, elle s'est interrogée au point de
se dire : "qu'est-ce qui m'arrive?"
Déchirures violacées
Quelle est la
plus belle preuve d'amour et de vérité dans l'art que l'interrogation de Monique
Layon. Loin de tout côté charmeur, elle prend son souffle de vie dans son art,
comme un coureur de fond.
Jean Grenier ne disait-il pas : "Le charme n'est qu'un malentendu, une équivoque
sans prolongement possible. On ne peut aimer que ce qui contraint à la vérité,
non ce qui séduit au passage. "
La
peinture de Monique Layon n'est pas du fard à joues, elle séduit en profondeur.
"Parcours d'artiste"
La carrière ou plutôt
le cheminement? de Monique Layon s'est déroulé tout naturellement comme un
destin préétabli. Originaire de l'Ardenne, elle mène une carrière d'enseignante
au pays de Liège et suit des cours de peinture à l'Académie des Beaux Arts
Les paysages Intérieurs.
Elle peignait de petits paysages, souvent ardennais, bien sentis et à
l'atmosphère bien rendue, très coutumiers pour nos cohortes de peintres. Puis,
par le biais de la couleur, de son exubérance, des transparences et des reflets
elle s'est laissée happée. Monique Layon est tellement absorbée par son art
qu'il n'y a pas eu de réticences en elle.
"Quand je peins je suis absorbée, c'est le plaisir total" dit-elle.
"' Introduction de l'inventaire des Sites - Province de Luxembourg. Administration de l'Urbanisme -1969 -Arthur Haulot - Commissaire général au Tourisme belge - Survey National
La conversion
L'abandon progressif du naturalisme dans la peinture, ses voyages dans les
Rocheuses, les tons mauves, ocre ou roux des saisons, le rosé des canyons, les
vagues et les reflets ont engendré en elle un état de dépendance, d'abandon et
d'attente. Alors la couleur, la tache sans canevas, sans étude préalable ont
commandé son mouvement, sa gestuelle et son intrépidité.
Ce n'est pas une composition, un tracé régulateur qui détermine
sa peinture, mais l'exubérance de la couleur et les tensions entre elles. Alors
jaillissent les zébrures, la gestuelle, les stries, sans détester le retour sur
le passé mais avec un acquis très épuré
Rendez-vous à Nadrin
Un
autre grand principe qui guide Monique Layon est celui du travail et de la
nécessité.
"Faites donc et jugez ensuite ' ; telle est la première
condition en tout art. " disait le philosophe Alain.
Monique Layon a repris dans le linteau de la porte de son art cette maxime du
philosophe et elle l'applique au jour le jour.
Poussez donc vos pas chez cette artiste tellement vraie, sans forfanterie ni trompettes, ayant approché par le travail un instant régulier de grâce, elle nous apporte le bonheur d'être au quotidien.
Monique LAYON
Galerie d'Art
Filly n°11 - 666O NADRIN Tél. : O84/44.46.84
Saccades en mouvements sourds